La transmission est un sujet peu abordé et souvent considéré comme secondaire dans les politiques publiques touchant au sujet des actifs agricoles. Mais comment se fait-il que les uns se plaignent de ne pas trouver de repreneur et que les autres cherchent désespérément à s’installer ?
Constat imparable
Avec 389 000 exploitations[1] contre 1 588 000 en 1970, les agriculteurs représentent 3% des actifs. Et la moitié d’entre eux ont plus de 50 ans.
Nous perdons également des terres agricoles. La France artificialise chaque année entre 50 000 et 60 000 hectares, soit l’équivalent d’un département. Le phénomène est lié à l’étalement urbain et… aux agriculteurs eux même. Engagés dans des logiques patrimoniales, ils préfèrent fréquemment la plus forte valorisation liée à la vente de leurs terres vers d’autres destinations que l’agriculture.
Pourtant les Nima sont là !
Les Non Issus du Milieu Agricole sont de plus en plus nombreux à vouloir s’installer. Selon les Chambres d’agriculture, qui animent 70% des Points accueil installation (PAI) et 95% des Centres d’élaboration des plans de professionnalisation personnalisé (CEPPP), ils sont 60% à se porter candidats. Si beaucoup vivront avec enthousiasme leur parcours d’apprentissage, ils devront nécessairement faire le deuil de leur projet fantasmé. En effet, ils vont potentiellement s’installer sur une ferme qui a un historique conditionnant la continuité d’un certain nombre d’activités et de contraintes !
Du côté des cédants :
Les cédants devront également dépasser certaines idées préconçues (ferme pas transmissible, car trop grande, trop petite, trop chère, pas attractive, projet du repreneur inadapté, etc.). Ils devront aussi bien murir leur projet (qu’est-ce qui peut évoluer ? Qu’est-ce qu’il est important de préserver ?)
« Il n’y a aucune situation identique, c’est le cédant qui fait qu’il y a reprise ou non. C’est lui qui décide s’il laisse ou non sa terre. Les paysans qui arrivent à la retraite devraient envisager plus facilement qu’on puisse installer plusieurs personnes sur leur ferme » Pierre, cédant, éleveur porcs et bovins viande [2]
Le processus s’inscrit dans un temps long et il est indispensable que le cédant reste maitre de la démarche.
De l’importance de la rencontre.
Se rencontrer, apprendre à se connaitre, construire la confiance sont clés dans ces dynamiques.
L’implantation territoriale importe aussi : la ferme est étroitement liée à son environnement. Des lieux d’échanges existent qui permettent de se sécuriser avec l’appui du voisinage, des services dédiés, des acteurs déjà engagés.
Les dispositifs se multiplient pour favoriser la mise en relation et l’accompagnement.
Le dernier en date, la plateforme Passerelles Paysannes qui réunit les nombreuses informations et démarches nécessaires à un projet d’installation. Elle est créée en collaboration par 6 réseaux de développement agricole (la FADEAR, SOL, Terre de liens, le réseau des CREFAD, le Reneta et Réseau Civam) et est effective depuis fin février 2022
Faciliter et accompagner est bien sûr indispensable, mais il s’agit également de faire évoluer les mentalités pour transmettre autrement en incitant à faire évoluer les modèles vers l’agroécologie. Les défis à relever pour préserver notre souveraineté alimentaire et nos ressources (eau, sol, air…) sont énormes. Le levier d’une population agricole dynamique et épanouie est absolument stratégique pour y arriver. Ici aussi, il y a une transition à faire pour que les désirs de l’ancienne génération rencontrent les envies de la nouvelle, que le passage de relai soit assuré dans la continuité historique et le changement vers un futur soutenable.
Dirigeante, fondatrice
Valsendo : la boussole des organisations professionnelles
[1] Source Agreste Dernier recensement 2020
[2] https://www.agriculturepaysanne.org/IMG/pdf/livret-aita-axe2-final-web-prot.pdf
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