Raison d’être ou RSE ?

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Les débats opposent parfois “raison d’être” et “responsabilité sociétale des entreprises[1]”. Comme si la RSE avait une approche de réparation des dégâts et de limitation des externalités négatives, là où la Raison d’être aurait des visées plus nobles, centrées sur l’utilité et le futur. Pour essayer d’y voir plus clair, quelques éclairages 

La raison d’être, de quoi s’agit-il ?

En 2018,  Bruno Le Maire Ministre de l’Économie confie à Nicole Notat (Présidente de l’agence VIGTous les articlesEO-EIRIS) et à Jean-Dominique Senard (PDG de Michelin) la mission “Entreprise et Intérêt général“, Ils rédigent le  rapport « L’entreprise, objet d’intérêt collectif ». Pour la première, il est mentionné que, face  aux  attentes croissantes du Grand Public et à  l’essor des défis environnementaux et sociaux, toute entreprise a désormais « une raison d’être non réductible au profit ».

Ce rapport Notat Senard aboutira à la promulgation de la loi PACTE.  L’article 1835 du Code civil, consacré à la définition des statuts de l’entreprise est complété par la  phrase suivante : « Les statuts peuvent préciser une raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. »

Il s’agit donc de définir « le motif, la raison pour laquelle la société est constituée. Elle détermine le sens de la gestion de la société en identifie l’identité et la vocation » (Étude d’impacts)

«  Elle vise à rapprocher les chefs d’entreprise et les entreprises avec leur environnement de long terme. Elles constituent une forme de doute existentiel fécond permettant de l’orienter vers une recherche de long terme (Exposé des motifs)

La raison d’être poursuit donc des objectifs orientés vers le futur, en rupture avec des approches court-termistes  et vient « en chapeau », orienter toute la stratégie de l’entreprise.

La RSE de son côté…

Elle est définie par la commission européenne[2] comme l‘intégration volontaire par les entreprises des préoccupations sociales et environnementales dans leurs  activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes.

En d’autres termes, la RSE c’est « la contribution des entreprises aux enjeux du développement durable ».

Et l’objectif pour l’entreprise est d’avoir un impact positif sur la société tout en étant économiquement viable.

La norme ISO 26000,[3] standard international définit le périmètre de la RSE autour de 7 questions centrales :

  1. la gouvernance de l’organisation
  2. les droits de l’homme
  3. les relations et conditions de travail
  4. l’environnement
  5. la loyauté des pratiques
  6. les questions relatives aux consommateurs
  7. les communautés et le développement local.

De sorte que la RSE est souvent renvoyée à des questions de conformité (Norme Iso, Déclaration de performance extra financière, devoir de vigilance…) dans une vision défensive, purement réglementaire comprenant uniquement des obligations.

Elle est de fait très mal comprise des petites et moyennes entreprises qui en ont une vision partielle, avec seulement l’angle environnemental ou social. Les salariés comprennent davantage la déclinaison de ses engagements (environnementaux ou sociaux) que le concept global de RSE.

Souvent compliqué à mettre en œuvre parce que transversal à l’organisation, nombre de TPE -PME n’ont pas les moyens de mettre en place une démarche structurée. Alors que très souvent, elles mettent en œuvre des actions qui relèvent de la RSE sans le savoir !

Même combat

La raison d’être et la RSE parlent en réalité de la même chose, ont la même finalité : ancrer les démarches prônant le long terme et la gestion de ses impacts au cœur de la stratégie de l’entreprise.

C’est l’ambition d’une stratégie économiquement durable permettant  une adaptation, voire un changement du modèle d’affaires, mais en s’assurant de la participation de toutes les parties prenantes internes (collaborateurs) et externes (partenaires notamment financiers). Ce sont finalement des démarches de réassurance quant à la pérennité économique de l’entreprise ou de l’organisation.

La nécessité « d’embarquer tout le monde » pour réussir est peut-être le grand changement de paradigme.  Et la crise a bien montré que les entreprises bien connectées à leur écosystème (leurs fournisseurs, leurs clients etc…) rebondissaient mieux et plus vite.  Autre effet collatéral bien expérimenté pendant les confinements, la nécessité de décloisonner les organisations pour plus d’adaptabilité et fluidité… Et donc de faire aussi évoluer le management et la gouvernance. L’approche est nécessairement systémique. 

En conclusion

On peut dire que la raison d’être est très grandement inspirée par les démarches RSE. Ne tombons pas dans le piège du formalisme qui voudrait opposer les 2 notions. La crise a démontré que la connexion aux parties prenantes était stratégique et a accentué la pression sociétale pour plus de transparence et d’information. C’est ensemble, en actionnant les leviers de l’intelligence collective que les entreprises pourront relever les défis de la relance !  

Valérie SENE

Dirigeante, fondatrice

Valsendo : la boussole des organisations professionnelles

 

[1] Responsabilité sociétale de l’entreprise : mise en œuvre du développement durable au sein de l’entreprise pour renforcer sa performance globale et être compétitive dans la durée. On parle de responsabilité sociétale des organisations pour la mise en œuvre du développement durable par l’ensemble des acteurs : État, collectivités territoriales, entreprises, syndicats, ONG, etc.

[2] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex:52011DC0681

[3] https://www.iso.org/fr/iso-26000-social-responsibility.html

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