Le 21ème siècle sera-t-il antifragile ?

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Lancé par Nassim Nicholas Taleb, auteur du best-seller Le Cygne Noir, le terme désigne la capacité à tirer profit des crises, des épisodes de stress, des environnements incertains. Tour d’horizon de la notion

 

Métaphores pour illustrer

Dans son ouvrage « Antifragile, les bienfaits du désordre », parue en 2012, Nassim Nicholas Taleb explique :

« Est fragile ce qui soumis aux aléas, aux chocs, se casse. Est robuste ce qui résiste jusqu’à un certain point. Est antifragile ce qui se renforce avec les aléas ou les chocs, jusqu’à un certain point là aussi. »

Il convoque 3 images pour illustrer les 3 notions :

L’épée de Damoclès pour ce qui est fragile. Est fragile ce qu’un danger constant peut frapper. Et qui de fait, craint l’imprévu et est complétement dépendant de ce qui va arriver de l’extérieur. A l’instar de la tasse de porcelaine qui tombe et ne doit son salut qu’à la main qui va la rattraper au vol…

 

Le Phénix, oiseau mythique qui meurt par le feu et renait de ses cendres pour imager la robustesse. Est robuste ou résilient la personne ou le système qui plie sous l’adversité, ne rompt pas mais n’a de cesse de retrouver son état initial.

 

L’Hydre de Lerne dont les têtes repoussent sitôt coupées illustre la notion d’antifragilité. Ici le système va même jusqu’à rechercher l’adversité qui le renforce. Il dispose de ressources intérieures qui stimulées vont le faire prospérer.

 

 

Caractéristiques

Mieux vaut être petit et agile pour maintenir une capacité d’adaptation et de flexibilité durant les temps de crises, par essence chaotiques et volatiles.

En effet, la taille semble être un facteur d’augmentation de la complexité dans les organisations. Elle va de pair avec une tendance à la sur-optimisation et à la sur-planification qui ne permettent pas d’avoir des marges de manœuvre humaines, des « espaces de respiration » pour apprendre de ses erreurs. Et l’auteur d’ajouter :

« Celui qui n’a jamais péché, écrit l’essayiste, est moins digne de confiance que celui qui n’a péché qu’une fois. Et quelqu’un qui a commis quantité d’erreurs — mais jamais plus d’une fois la même erreur — est plus digne de confiance que quelqu’un qui n’en a jamais commis »

 

Apprendre à stresser

Taleb préconise une exposition à de « petits stress fréquents » pour tester, pousser à l’autonomie les différentes parties du système. A l’image d’un corps vivant, elles doivent se développer, grandir, se renforcer sous l’effort, la contrainte et la confrontation à leur environnement.

 

Oser la simplification et apprendre à soustraire

Dans un monde VUCA[1], caractérisé par une infobésité galopante, Taleb recommande de faire du tri entre ce qui relève du « bruit » : brouhaha d’informations inutiles et ce qui constitue de vrais signaux (faibles). Apprendre également à regarder sur le temps long, les tendances, les vérités…  qui persistent. Cette prise de recul, permet de choisir les risques et les épisodes de stress vertueux auxquels on décide de s’exposer et de se préserver d’une agitation improductive.

Et plutôt que de céder à la « néomanie », qui pousse à  désirer toujours plus, l’auteur invite à apprendre à soustraire le futil et l’accessoire, à éliminer ce qui « ne marche pas, » et à considérer toutes les choses négatives qui ne sont pas arrivées !

L’époque actuelle nous livre un exemple éloquent : certes, la barre des 4 millions de décès a été franchie selon OMS début juillet 2021, mais  ce chiffre aurait été 7 à 10 fois plus conséquent si les pays n’avaient pas déclenché leurs mesures drastiques. C’est au final, la plus grande opération humanitaire jamais réalisée. Cette pharamineuse performance permet-elle d’arguer de l’anti fragilité de notre 21ème siècle ?

 

Valérie SENE

Dirigeante, fondatrice

Valsendo : la boussole des organisations professionnelles

 

 

[1] La notion de VUCA (Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity –) a été introduite par l’US Army War College pour décrire la Volatilité, l’Incertitude, la Complexité et l’Ambiguïté d’un monde post-guerre froide. Elle s’est rapidement imposée à toutes les organisations et définit désormais l’environnement dans lequel elles évoluent.
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